fin octobre 2011

   Nous avons évoqué les rencontres avec les Iraniens, mais pas la surprise de Kandovan, village troglodyte perdu au bout d’une route cul-de-sac… Certes, l’endroit est touristique, mais la saison est terminée et ce sont surtout des «locaux» que nous croisons en arrivant dans ce village un peu magique. Or, sur le parking, nous avisons un fourgon aménagé immatriculé en France ! La petite famille, Damien, Marie-Hélène, Léandro (14 ans), Hersilia (7 ans) et Simon (5 ans) apparaît quelques minutes plus tard. Ils voyagent comme nous, pendant un an, à la découverte de l’Asie. Ils sont entrés en Iran quelques jours avant nous, par la frontière de Sero, sans aucun problème ni bakschich !...


    Après les papotages d’usage pour faire connaissance, nous partons découvrir ensemble les mystérieuses habitations, creusées dans la roche tendre à la fin de l’époque sassanide (7ème  siècle) : des Perses, vraisemblablement zoroastriens (culte du feu), refusant de se convertir à l’Islam naissant que les envahisseurs Arabes voulaient imposer, se seraient réfugiés dans ces collines et les auraient creusées pour s’y cacher et éviter de se faire tuer. Un vieux berger nous invite à «visiter» son humble demeure : une pièce unique recouverte de tapis et meublée d’un petit poêle à bois, d’une cuisinière et d’un frigo, le tout situé au-dessus de la bergerie creusée au rez-de-chaussée. Il nous offre des pommes… et tend la main pour un petit billet ! Après tout, pourquoi ne pas profiter des revenus que les touristes peuvent fournir ?


    Après ce bon et beau crapahutage, nous fêtons dignement l’anniversaire d’Amélie –5 ans tous ronds– avec les nouveaux copains, autour d’un gâteau marbré raté mais délicieusement caramélisé, à dix dans notre cabane à roulettes. Trop chouette ! L’équipage du «Cyclope» nous propose ensuite de dîner au restaurant du coin tous ensembles, nos camions respectifs étant un peu petits pour accueillir dixpersonnes à la fois pour un vrai repas… Au menu : kebab (c’est-à-dire : brochettes) de viande hachée de bœuf ou de poulet à enrouler dans de grandes feuilles de pain et à déguster comme un sandwich, ragoût de viande d’agneau avec pois chiches et carottes, et tomates grillées. Nous sommes installés sur les banquettes traditionnelles recouvertes de tapis où nous nous asseyons en tailleur et tachons de ne pas nous tâcher… Les enfants ont leur banquette ; ils mangent comme des cochons, font un concours de grimaces et se racontent les péripéties et anecdotes de leurs voyages respectifs. Nous sommes ravis de nous ressourcer auprès d’«expatriés» comme nous, de partager nos impressions, nos sentiments. Et ravis aussi que nos enfants s’amusent autant ! Cela leur manquait de jouer avec des enfants de leur âge et vivant le même genre d’expérience…


    Nous nous retrouvons le lendemain matin à l’Hôtel International (s’il-vous-plaît !) car Marie-Hélène a négocié de pouvoir confier son linge sale à la laverie de l’hôtel et nous avons bien besoin, nous aussi, de décrasser nos affaires, notamment les draps ! Nous nous installons donc sur le parking de l’hôtel en attendant le début d’après-midi que tout soit sec et en profitons pour faire un peu d’école… Un des employés propose à Marie-Hélène de venir se mettre au chaud dans la salle de restaurant avec Hersilia et Simon et nous les rejoignons car dehors, un vent glacial souffle et la température est un peu fraîche dans le camping-car. Nous décollons en milieu d’après-midi, draps propres et secs, et faisons route vers Tabriz, tandis que nos nouveaux amis se dirigent vers Téhéran directement…


    Tabriz

    Nous arrivons en fin de journée et sous la pluie… direction le Parc ElGoli, que nous ont recommandé les «Cyclope». Il s’agit d’un grand jardin en périphérie de Tabriz, où l’on peut entrer en camion et se
garer, en l’occurrence pour nous, à côté d’une mosquée toute illuminée de vert. Et nous remettons ça en fêtant à nouveau l’anniversaire d’Amélie tous les cinq, autour cette fois-ci du menu choisi par l’intéressée, à savoir : chips, coca, et glace à la vanille en dessert, avec musique à fond dans le camion ! Sabine voulait servir des haricots verts en bocaux en guise de «verdure», mais à l’ouverture : mauvaise surprise, cela sentait tellement fort le vinaigre que Thierry a goûté et a eu aussitôt la bouche en feu ! C’était en fait…des piments ! La nuit fut fraîche, agrémentée d’un charmant contrôle de police à une heure du matin, mais plutôt calme en début de matinée : à nous la grasse mat’ ! Malgré le fait que nous soyons vendredi (jour de prière), nous partons tout de même découvrir Tabriz. Nous y visitons le Musée Qajar (ancienne maison d’Amir Nezam Shah), la Mosquée Bleue et le Bazar, désert, grâce à Mahmet et Bahram, tous deux rencontrés au hasard des rues et tous deux disponibles pour nous guider dans la ville (voir «carnet de route» 9) ce jour-là.


 
  Soltanyieh

    Superbe mausolée au bout d’une route de la plaine, son dôme culmine à 48 mètres de haut (c’est le plus haut du monde) et il fait 25 mètres de diamètre ! Au départ, il devait accueillir la dépouille de l’Imam Ali, gendre de Mahomet. Mais le promoteur, le sultan Oljeitu Khodabandeh s’étant entre temps converti au sunnisme, se l’attribua pour y être lui-même enterré. Quoiqu’il en soit, le monument est magnifique et impressionnant, il offre même une vue panoramique sur toute la plaine alentour.


    Le bord de la mer Caspienne à Kiyashahr

    «T’as voulu voir la mer et on a vu la mer…»

On l’a surtout cherchée longtemps ! Et démasquée au bout d’un long ponton bordé de roseaux. Mis à part le fait que nous bénéficions d’une météo fort clémente - il pleut beaucoup dans la région d’ordinaire - rien de bien extraordinaire : grande plage, sable fin mais un peu gris, vaguelettes et vent. L’originalité par rapport à ce que nous connaissons des plages européennes réside dans les petits kiosques en bois élevés à quelques centimètres du sol pour permettre de pique-niquer sans croquer trop de grains de sable en même temps. Il y a aussi ce grand mur de séparation en béton qui coupe la plage en deux jusqu’au rivage afin de bien séparer hommes et femmes pendant les bains de soleil et la baignade ! Heureusement pour nous, la saison était terminée et nous pouvions pique-niquer tous ensembles sur la plage déserte, dans le cabanon de Mohammad (voir «carnet de route» 9).


    Lahijan

    Pour nous rendre dans la capitale du thé, nous traversons d’immenses plaines gorgées d’eau où la culture du riz est omniprésente. Les vaches broutent dans les parcelles, c’est étonnant. Apparemment, la récolte se fait à la main et la séparation du grain au moyen de batteuses thermiques. Lahijan ressemble à une ville thermale et s’articule autour d’une immense pièce d’eau rectangulaire. Elle est entourée de
collines abruptes recouvertes de plantations de thé, que nous admirons du haut de Sheitan Kuh («montagne de Satan ») où nous élisons domicile pour la nuit, à l’écart des attractions et autres kiosques à qalyan (pipes à eau). La vue sur Lahijan est magnifique, d’autant que beaucoup de toits sont colorés (jaunes, rouges, bleus, verts, orange…). Nous dévalisons aussi un grand supermarché (l’équivalent d’un «Petit Casino» de quartier en France…) et Amélie trouve son cadeau d’anniversaire car il y a ici quelques magasins de jouets. Nous faisons aussi le plein de carnets à dessins pour nos artistes bien productifs.


    Qazvin

    Cette étape est pour nous synonyme d’une belle rencontre. Arrivant tard, nous dénichons un super coin tranquille à l’écart du brouhaha de la ville, juste à côté de la gare (les trains ici ne font pas de bruit, même quand ils freinent), sous les moustaches de la police bienveillante mais prudente (l’officier photocopie nos passeports et visas au-cas-où ?). Au matin, alors que Thierry sortait les poubelles, Firuz est apparu et a tout de suite proposé de nous faire faire le tour de sa ville en Paykan (la voiture iranienne par excellence, hyper économique : 17 litres aux 100 !), délaissant son travail pour nous montrer les principaux monuments et nous faire goûter les délicieuses pâtisseries que sa sœur et son beau-frère fabriquent. C’est ainsi que nous admirons les Citernes Sardar, réserves d’eau souterraines rafraîchies par des badgirs (tours du vent,
ancêtres la « clim’ »), le mausolée d’Hossein, le petit palais Chehel Sotun, les portes de la ville : Ali Qapu, Rash kushk et Darvaseh-e-Qadim-e-Tehran et la Mosquée des quatre Prophètes.


    Pour le déjeuner, il nous indique une sorte de cantine où nous achetons des portions de riz avec kebab de viande hachée ou poulet, délicieux, pour 20000 riels par personne, soit à peine 1,50 euros ! Nous dévorons ce bon «miam» au camping-car pendant que notre ami Firuz rentre déjeuner chez lui, puis il vient nous rechercher et nous dépose devant le Bazar de Qazvin. Il nous laisse un téléphone portable pour que nous l’appelions dès notre retour au camion, car il vaut nous emmener chez sa sœur le soir. Nous visitons la Mosquée Nabi, dont la cour est surprenante car en contrebas. Elle accueille une école coranique réservée aux jeunes hommes. Ensuite, nous déambulons dans le Bazar qui nous paraît tout calme et dont les allées sont très larges. Là, nous faisons le plein de fruits, légumes et fruits secs dont les enfants raffolent.


    Enfin, étape «administrative» : le café internet pour envoyer notre travail et lire nos mails. Impossible cependant d’avoir accès à notre site : il y a des filtres… Nous prenons le taxi de nuit pour rentrer, expérience plutôt sympa de traverser la ville sans avoir à se soucier des mobylettes qui roulent à contresens sans feux ou des autres véhicules qui «créent» une troisième voie de circulation dans les virages… Firuz nous attrape au vol, nous conduit à la pâtisserie de sa sœur, Sherifa, où nous choisissons un peu de tout - car la gourmandise, ça ne se maîtrise pas, puis chez elle, où nous faisons également  connaissance de ses enfants : Parvin et Navid. Au début, nous pensons que c’est juste pour une tasse de thé, mais en fait, c’est un adorable traquenard : elle a cuisiné pour nous et nous sommes invités à partager leur repas ! Ensuite de quoi Firuz nous guide jusqu’à un parking «safe and quiet», nous faisant passer par une ruelle si étroite que nous craignons un moment que le camping-car reste coincé entre les deux murs… Nous changeons de lieu de bivouac car les policiers de la gare nous ont fait comprendre qu’il fallait partir : dommage… Nous nous retrouvons donc en périphérie de la ville, à côté d’une cahute de policiers, à qui Firuz explique la situat
ion. Il nous laisse à nouveau un téléphone car il veut nous présenter sa fille Mernush et son fiancé, qui arrivent le lendemain matin de Tabriz : nous les appellerons donc quand nous serons réveillés afin de les retrouver puis de nous dire adieu.
 

10 Iran / nord-ouest /

mer Caspienne / plateau central