fin octobre 2011
KASHAN
Nous gagnons la périphérie de la ville pour établir notre bivouac derrière un énorme hôtel semi-luxueux, où l’on nous accueille très cordialement. Le plus grand luxe, c’est de pouvoir nous connecter à Skype dans le camping-car et d’appeler en France, pour la première fois depuis notre départ : Grand-Père François et Grand-Mère Valou sont au rendez-vous ! Inès et Martin, que l’on croyait endormis, bondissent de leurs plumards et se hâtent de raconter plein de trucs à leurs grands-parents adorés (qu’ils voyaient au moins une fois par semaine d’ordinaire, avant le voyage…). C’est trop rigolo de se voir dans la caméra, même si l’image n’est pas d’une qualité extraordinaire. Nous ne parvenons en revanche pas à sortir Amélie du sommeil qui l’engourdit… Ce sera pour une prochaine fois. Bien entendu, comme nous pouvons utiliser Internet en illimité, nous passons une longue partie de la soirée à consulter nos mails et à y répondre… Nous jetons également un œil sur le site français du Ministère des Affaires Etrangères afin de vérifier que rien de spectaculaire ni dangereux ne se passe dans le pays en ce moment, puis finissons par nous coucher.
Le soir, le deuxième épisode de contact par Skype, avec des amis et leurs enfants cette fois-ci, se solde par un énorme coup de blues chez Inès et Martin, qui ont envie de retrouver leur maison, leurs chambres, leurs jeux, leurs copains-copines, grands-parents et famille … Nous savions que cela pourrait arriver, mais cela nous serre un peu le cœur de sentir un si gros chagrin. Nous essayons de relativiser le temps qu’il reste avant de rentrer (pas évident : nous ne sommes partis que depuis 2 mois !) et mettons en perspective tout ce qui nous reste de merveilleux et d’exceptionnel à voir et à faire. Ah ! si les câlins n’existaient pas, nous serions bien démunis… Le lendemain, en partant, nous dévalisons un "grand" supermarché dans lequel, pour la première fois, les gens ne sont ni aimables ni souriants. Cela dénote de ce à quoi nous étions habitués jusqu’à présent !
Une longue route nous attend, sur fond de steppes quasi-désertes au pied des montagnes. Nous testons un nouveau pain, type "crackers" avec graines de cumin incrustées, mais de la taille d’un oreiller ! Facile à ranger, quoi ! En tous cas, délicieux.
Nous découvrons Ispahan-La-Magnifique de nuit, accompagnés par un "local " qui nous emmène jusqu’au Parc Ghadir, un peu excentré, que nous ont recommandé les copains Cyclope. C’est impeccable comme lieu de bivouac : parking en lisière d'un parc boisé avec bassins, WC à proximité, eau à disposition : bref, nous sommes gâtés ! Les Cyclope débarquent d’ailleurs quelques heures plus tard, ce qui nous ravit. Ce n’est que le début, car la découverte de la ville en elle-même n’a pas fini de nous enchanter ! Le premier jour, nous gagnons le centre en taxi, mais ensuite, nous essaierons le bus (hommes à l’avant, femmes et enfants à l’arrière), bien sympa malgré la ségrégation. Au menu de notre enchantement :
Le lendemain matin est consacré à l’école en plein air, la lessive (on aime vraiment ça !) et les coupes de cheveux, pour Martin puis Amélie. On pique-nique dans l’herbe, comme le font beaucoup d’Iraniens qui débarquent avec leurs tapis, les cocottes-minute, les galettes de pain, voire les tentes "pop-up " et qui passent ainsi leurs journées de repos ou leurs soirées en famille ou entre amis. Il faut dire qu’il n’y a pas beaucoup de loisirs en Iran ; on nous a dit que la plupart des gens travaillaient essentiellement pour se nourrir et se payer un toit, mais qu’ils n’ont pas vraiment l’occasion d’avoir des passions ou des hobbies.
Après une dernière lessive dans le parc Ghadir et un dernier pique-nique avec nos copains Cyclope, nous quittons Ispahan et prenons la direction de Naïn. Nous bivouaquons sur un terrain attenant à un hôtel où le réceptionniste nous enferme à clé, pour notre sécurité, sans doute ?... Le lendemain, tour de la ville ; on nous offre à nouveau le pain frais à la boulangerie (à croire que c’est une tradition !), on nos accompagne dans le quartier de Mohammedia vers les ateliers souterrains (pour rester au frais l’été) des tisserands de poils de chameaux qui fabriquent d’immenses pièces de laines et les assemblent pour en faire des manteaux : ils sont indispensables pour les nomades qui se protègent ainsi du froid nocturne. Ils font aussi des tapis dits « kilims », en poil de chameau et laine de mouton, avec motifs géométriques de couleur. En retournant en ville, nous visitons l’adorable Mosquée Jameh, qui ne comporte ni minaret, ni iwan**, mais qui est ceinte de murs crénelés et entourée de vergers (pistachiers, grenadiers…), irrigués au moyen des traditionnels qanats***. Deux bagdirs insérées dans le mur d’enceinte dominent l’ancienne citerne.
***ISPAHAN a été la capitale de l’Empire perse sous la dynastie des Safavides entre le XVIème et le XVIIème siècle. C’est une «vitrine» de l’architecture et de l’art safavides.
**iwan : salle rectangulaire, close de murs sur trois côtés et ouverte sur le quatrième au moyen d’un vaste porche voûté
***qanat : système d’irrigation souterrain, permettant de récolter les eaux d’infiltration et inventé par le Perses bien avant J.C.