mi-novembre 2011

    Le ferry débarque à Sharjah, l’un des sept Emirats Arabes Unis. Thierry descend le camping-car et le gare devant un hangar, puis nous grimpons dans le bus-navette qui nous fait traverser les docks et nous conduit au poste-frontière. L’attente va durer cinq heures en tout, avant que nous puissions enfin sortir, « libres » ! D’abord, tous les passagers s’assoient dans une salle (climatisée, Al Hamdullah !), les Iraniens d’un côté (ils ont besoin d’un visa), les Emiratis et ceux qui, comme nous, peuvent entrer « gratuitement » de l’autre, mais femmes et hommes séparés ! Nous attendons au moins une demi- heure que les douaniers daignent venir s’installer derrière les trois guichets et faire chauffer leurs tampons… Ils portent un long vêtement blanc et une épaisse corde noire maintient leur foulard (blanc ou à carreaux blancs et rouges) sur leurs têtes. Là, aucune règle du jeu n’a été distribuée, mais nous voyons les femmes se presser aux guichets, avec les passeports de toute leur famille à la main. Les hommes, eux, patientent ou tapotent sur leurs téléphones portables. Parfois, l’un d’eux – qui voyage sans doute seul - se lève pour s’insérer dans la queue ; le militaire qui nous « surveille » le remet en place devant tout le monde, le priant de se rasseoir (et de perdre ainsi la place en tête qu’il avait réussi à atteindre !). En fait, dès qu’une série de personnes, celles qui étaient au premier rang, passe au « tamponnage », le rang de derrière se lève et prend place devant. Hyper hiérarchisé comme système ! Nous ne bronchons pas, nous les seuls touristes occidentaux noyés parmi ces familles pressées de retourner au bled. Ceci dit, Nous avons annoncé à mon cousin Julo, qui habite à Dubaï, que nous débarquions chez lui le jour-même, et il nous faut le prévenir que nous ne pouvons fixer d’heure pour le moment… Or, comble de poisse, nous n’avons plus de crédit SMS sur notre portable. Un gentil gars rencontré sur le bateau nous prête son portable et nous pouvons ainsi organiser notre après-midi avec Julo. Alors que la salle se vide au compte-goutte (nous nous voyons presque dormir là tellement c’est long), le douanier remetteur-en-place nous avise et nous fait comprendre que, comme nous sommes une famille, nous pouvons nous avancer. Et voilà-t-y pas qu’il nous fait doubler un petit papi qui attendait sagement depuis un quart d’heure ! Nous nous sentons trop mal… Ceci dit, c’est plaisant de sentir les choses avancer ! D’autant que nous ne sommes pas au bout de nos peines… Point positif dans toutes ces démarches : le moment où le douanier montre à Sabine le foulard qui cache ses cheveux et dit « This is islamic ! Here, no islamic ! ». Finie la contrainte du voile! Les passeports sont tamponnés et nous avons désormais le droit de rester aux Emirats pendant un mois. Mais il faut à présent faire les papiers du camping-car (carnet de passage en douane). Et c’est reparti pour une série d’allers et venues dans les différents bureaux –transport en voiture de police inclus ! – où, du reste, on lâche une poignée de dollars par-ci et une autre par-là (220 en tout). C’est Thierry qui joue à cet étrange Monopoly, pendant que les enfants et Sabine ont pu regagner le camping-car et se dégourdir les jambes et le cerveau (pas du tout adaptées, ces longues heures d’attente dans des salles aseptisées où il est préférable de ne pas faire trop de chahut…). Au bout d’un moment, ils commencent même à déjeuner. Un marin qui pique-nique dans la soute du ferry, en face,  vient d’ailleurs s’assurer qu’ils ont tout ce qu’il faut pour le repas : trop attentionné. Il est 14 heures quand la voiture de police dépose Thierry devant le camping-car : la carte grise est restée dans le sac de Sabine… Décidément, il faut être bon-joueur pour passer les frontières ! Allez, plus qu’un aller-retour, un coup de tampon et c’est fini ! Nous faisons le plein d’eau avant de sortir du poste-frontière : elle coule, mais chaude ! Il doit d’ailleurs faire au moins 30°C.


    Le paysage contraste av
ec celui de l’Iran : immenses avenues avec trottoirs intégrés, bâtiments modernes aux proportions XXL, 4x4 à tous les coins de rue (snif ! Plus de Paykan : nous nous y étions habitués, à force) et puis… les buildings ! Ceux de Sharjah sont déjà impressionnants, mais ceux de Dubaï, quelques kilomètres plus loin, nous scotchent : de la démesure pure et dure ! Nous découvrons aussi les plages immaculées (où, comme il est écrit en rouge sur les panneaux, le nudisme et formellement interdit, qu’il soit total ou partiel) au pied de ces géants de vitres et d’acier.
Une artère de deux fois six voies traverse Dubaï d’ouest en est : c’est Sheikh Zayed Road. Au bout d’une bonne heure, nous connaissons le tronçon de la sortie n°46 à la sortie n°48 par cœur. Nous demandons notre route à plusieurs bonnes âmes, mais la ville est tellement grande qu’elles n’en connaissent pas tous les quartiers… Enfin, nous touchons au but ! Le cousin de Sabine habite dans une résidence dont le parking, immense et arboré, se prête parfaitement à un bivouac de camping-car. Chez Julo, retour aux conditions de vie « normales » : cuisine équipée, vaste salon (pas besoin d’enjamber la table
de la salle à manger pour aller chercher le sel…), et salle de bain grandeur nature ! Ce sont les enfants qui sont ravis : l’eau est chaude pour la douche ! D’ailleurs, elle est tout le temps chaude ici, mais …dans le robinet d’eau froide. Et, pour avoir de l’eau froide, il faut tourner le robinet d’eau chaude… En effet, l’eau stockée dans le cumulus reste fraîche, tandis que celle qui circule librement dans les tuyaux se réchauffe. Allez comprendre… Bref, les retrouvailles sont arrosées d’un délicieux jus de raisin amélioré produit dans la région de Pommard, si vous voyez ce que je veux dire… Après un mois d’abstinence, nous apprécions au centuple !


    Les deux jour
s qui suivent se ressemblent : après une bonne nuit, fraîche et sans moustiques, nous envahissons l’appartement de Julo pour faire la classe et consulter nos mails. C’est aussi l’occasion de mettre à jour nos contrats d’assurance (maladie, AVI-International et camping-car) et de contacter famille et amis par Skype : le luxe ! Sans compter le lave-linge, qui tourne lui aussi tous les jours, afin d’écumer la balle de linge sale que nous avions eu la flegme de brasser à la main ces derniers jours.
L’après-midi, nous gagnons la plage, dans le quartier des expatriés : Jumeirah. C’est un véritable bonheur que de marcher dans un sable fin et propre, de le transformer en château-fort avec douves intégrées et de glisser, en bikini (en ce qui concerne S
abine, évidemment) dans une eau limpide et tiède ! Finis les détritus qui jonchent le sol et les vagues qui charrient des sacs plastique. De plus, toutes les communautés se retrouvent ici : Emiratis de souche, Occidentaux, Indiens, Pakistanais, Bangladais, chacun avec sa culture du bain (c’est-à-dire : plus ou moins habillé) et surtout dans une grande tolérance. Le deuxième jour, nous y retrouvons nos copains Cyclope, qui ont débarqué ici une semaine plus tôt, et nous passons une bonne soirée de retrouvailles, autour d’un bon petit vin blanc… Durant les trois jours suivants, nous sommes reçus chez des copains expatriés, qui nous accueillent carrément dans leur maison, dans de vrais lits, et où les enfants prennent un vrai bain dans une immense baignoire, avec leur nouveau copain Elouan. Mise entre parenthèse de la version « routarde » de notre voyage… Au coucher du soleil, en nous baladant sur la plage toute proche, nous écoutons Julie nous raconter l’histoire de quelques-uns des étonnants buildings qui se dressent au loin. Evidemment, nous ne pouvons pas manquer Burj Khalifa, la tour – à l’allure télescopique - la plus haute du monde avec son presque-kilomètre. Elle clignote toutes les heures et demi-heures, comme une certaine tour Eiffel…


 
  De la ville en elle-même, nous expérimentons : le métro aérien, le quartier de la Creek (quartier ancien de Dubaï) avec son Musée Dubaï, qui met en scène de manière très pédagogique l’évolution de la ville, depuis le petit village de pêcheurs qu’elle était au début, jusqu’à la folie architecturale contemporaine, portée par la découverte du pétrole et la richesse qui émane de son exploitation, de nos jours. Nous traversons le bras de mer qui sépare le quartier de Deira de celui de Dubaï en abra, embarcation en bois couverte d’un abri, qui sert de taxi entre les deux rives. Le souq aux étoffes nous transporte de l’autre côté de l’Océan Indien, tandis que celui des épices émoustille nos
narines… et nos mirettes ! On y trouve beaucoup de myrrhe et d’encens, essentiellement produits en Oman.

Nos amis connaissent une librairie française… nous nous y rendons et tâchons de tenir Inès, Martin et Amélie, qui sont en affreux manque de nouvelles lectures. Et dire que les trois bouquins qu’ils remportent fièrement chacun vont être dévorés en deux coups de cuillère à pot… Nous assistons aussi à une messe, dite en français. L’église est partagée en deux : à peine l’office est-il terminé dans notre langue qu’un autre, dit en anglais et fréquenté par une large communauté pluriculturelle, commence dans la foulée.

 

13 Emirats Arabes Unis /

          l’arrivée à Dubaï