février 2012

    Amman

    Le programme de notre première matinée dans la capitale jordanienne sera à consonance diplomatique : grâce aux explications fournies par téléphone par François et Caroline (rencontrés à Jerash et habitant Amman), nous parvenons à retrouver l’ambassade d’Egypte, dont nous avions une adresse erronée. Il pleut des cordes et l’ea
u dévale des collines goudronnées. Nous apprenons que nous n’avons pas besoin de faire faire nos visas égyptiens à l’avance car on pourra nous les délivrer à la frontière. L’ambassade du Liban se trouvant juste à côté, Sabine y fait un saut : nous aurions aimé y passer les fêtes de Pâques au Liban, mais l’accès y est difficile. Il est impossible d’y entrer par Israël et la frontière est délicate du côté syrien. De plus, le guichetier émet des réserves quant à l’éventualité que la Syrie nous laisse entrer sur s
on territoire, notre Président s’étant apparemment montré très « ferme » ces derniers temps avec le pouvoir en place…

    Dernière ambassade, celle d’Israël, enclavée dans un quartier totalement bouclé par les forces de sécurité ! Nous stationnons à côté d’un abri sous lequel sont installés des casiers ; toute personne voulant pénétrer dans l’enceinte de l’ambassade doit y laisser ses affaires, à l’exception des passeports. Au bout d’un quart d’heure, une jeune femme va chercher quelqu’un dans le bâtiment diplomatique, qui accompagne Sabine jusqu’à l’entrée. Là, ils attendent une demi-heure dans le vent et la pluie que    l’on daigne leur ouvrir. Portail électronique et scanner vous souhaitent la bienvenue… Heureusement, l’employée du guichet est adorable et fournit à Sabine tous les renseignements qu’elle demandait concernant les modalités d’entrée et de séjour en Israël. Cela s’avère d’ailleurs très simple étant donné que nous sommes Français et que nous n’avons donc pas besoin de visa au préalable. Enfin une « bonne » nouvelle !

    Maintenant que nous avons toutes les infos dont nous avions besoin pour envisager la suite de notre périple, nous pouvons aller rendre visite à nos copains français rencontrés à Jérash. Ils habitent dans le quartier « chic » d’Abdoun. Caroline, la
maman, nous accueille, puis ses enfants rentrent de l’école et les retrouvailles s’opèrent. Nous apprécions l’espace de leur appartement, et surtout le chauffage ! Nous abusons aussi de la connexion internet « à domicile » pour joindre grands-parents et amis par Skype… Les enfants s’ébrouent dans un bain bien chaud, entre une partie de cache-cache et une autre de Playmobil, puis nous dînons ensemble et nous régalons des délicieuses lasagnes cuisinées par Caroline.

Le lendemain matin, nous nous installons bien au chaud chez les copains pour faire classe. Eux aussi sont à l’école et terminent leur journée vers 14 heures. Quand tout le monde est rentré, nous partons nous balader dans le vieux quartier d’Amman : Down Town, où ça brasse bien. Les étals envahissent les trottoirs, les vendeurs de fruits et légumes font un concours de celui qui hurlera ses prix le plus fort, les terrasses des immeubles sont couvertes de paraboles et de réservoirs d’eau. Nous quittons nos nouveaux amis le jour suivant, heureux de les avoir rencontrés et reconnaissants de l’adorable accueil qu’ils nous ont réservé. Dans la rue, une bétonnière tourne sans discontinuer ; tout est monté à la main pour la construction des bâtiments.

   
Etape suivante : déjeuner chez les Américains rencontrés à Béthanie. Nous tournons un peu pour trouver leur immeuble, mais il fait grand beau, alors c’est moins pesant. John et Deeana nous ont préparé un repas typiquement yéménite. Les enfants sont ravis car on peut manger avec les doigts ! Ensuite, ils jouent avec Gaby, Ethan, Daniel et Elyana, oubliant la barrière de la langue… Une fois de plus, nous partageons un super moment avec une famille encore inconnue deux heures plus tôt !


    Madaba

    Haut-lieu de la Chrétienté, Madaba accueille une dizaine d’églises, dont l’Eglise Saint-Georges et la fameuse carte (16m x 6m) de Palestine en mosaïque (VIème siècle). Nous y visitons aussi l’Eglise des Saints Apôtres (même époque), où nous admirons une immense mosaïque représentant la déesse de la Mer ainsi que des personnages qui pêchent et des animaux très colorés. Le Parc archéologique est lui aussi très intéressant, avec son cardo romain, ses multiples mosaïques (les plus anciennes retrouvées en Jordanie), son Eglise de la Vierge (VIème siècle) et d’autres vestiges encore bien conservés. La ville regorge d’ateliers de mosaïques, mais aussi de boutiques de souvenirs pieux : elle accueille beaucoup de pèlerinages. 

    Le Mont Nebo

    Moïse y aurait guidé le peuple juif après son long exode et il se serait arrêté là, trop fatigué pour continuer jusqu’à la Terre Promise d’Israël, que l’on voit depuis le sommet (840 m : pas si haut que ça, en fait) du Mont. De belles mosaïques sont exposées sous une tente car l’Eglise, qui abrite une autre superbe mosaïque retrouvée intacte dans le diaconicon (sacristie) est en cours de restauration, ce qui nous déçoit un peu…

   Dibban

    Nous nous arrêtons dans ce village pour bivouaquer et recevons l’autorisation de Kaled, un habitant, pour stationner le long de la clôture de sa maison. Il nous rend visite, accompagné de son fils Oussama, 10 ans et nous causons un peu, mixant l’Arabe et l’Anglais de manière peu académique… Il nous quitte pour aller dîner avec sa famille, mais revient une heure plus tard avec une couverture de laine qu’il offre à Inès, de peur qu’elle ait froid cette nuit ! Nous avons beau le rassurer en lui disant que nous pouvons mettre le chauffage, il nous répète une dizaine de fois de ne pas hésiter à venir chez lui chercher des couvertures supplémentaires, au cas où. Encore une chouette manifestation de l’hospitalité jordanienne !


    Umm
ar-Rasas

    Avant de déjeuner chez Kaled, nous filons visiter le site archéologique d’Umm ar-Rasas, classé au Patrimoine mondial de l’Unesco. Il abrite au moins dix églises et chapelles, dont l’Eglise Saint-Etienne et l’Eglise Saint-Serge et surtout de magnifiques mosaïques des VIème et VIIIème siècles représentant notamment les villes situées dans le delta du Nil, mais aussi de part et d’autres du Jourdain (Jérusalem, Naplouse, Umm ar-Rasas, Amman, Madaba…). Le reste du site ressemblant beaucoup à un « tas de vieilles pierres », elle inspire très rapidement aux enfants une immense aire de jeux en plein air et nous voilà embarqués dans une partie de « Boîte à sardines » (tout le monde se cache, sauf un qui cherche ; les cachés-pas-encore-trouvés essaient de se retrouver dans la même cachette, sans faire de bruit…) sur fond de maisons byzantines en ruines, et nous nous amusons bien !

    Kaled, son frère, sa femme et leurs deux fistons, Amjad et Oussama, nous attendent pour le repas et nous régalent de riz au poulet avec des légumes et du yaourt. Très vite, tous les enfants se mettent à faire des
cabanes avec les coussins des canapés et rigolent tant et plus. Nous quittons nos charmants hôtes et prenons la route du Roi et mettons le cap sur Kerak. Le paysage nous fait penser à celui de notre Beauce française, un peu monotone… Heureusement, la vue impressionnante et vertigineuse qui surplombe le Wadi Mujib nous réveille les mirettes ! En contrebas, un barrage retient l’eau qui permet d’arroser les cultures installées en terrasse sur les coteaux de la vallée.


    Kerak

    Bien que le ciel soit couvert, nous nous régalons de la visite de ce château de croisés (construit en 1142 par Payen le Bouteiller et repris ensuite par le terrible Renaud de Châtillon)  qui domine la vallée. Nous arpentons avec curiosité le dédale de ses nombreux souterrains, complétés au fil des siècles par les Mamelouks et éclairés par des puits de lumière qui traversent parfois deux ou trois étages de tunnels !


   R
éserve naturelle de Dana
    Après un bivouac tout calme au milieu de nulle part, au bout d’une piste de cinq kilomètres, nous découvrons un paysage embrumé, montagneux, magique. Nous rejoignons le village de Dana car la réserve est fermée (basse saison) et nous n’avons pas le droit de nous y balader. Les habitants s’affairent à mettre leurs habitations, maisons d’hôtes et restaurants en état avant la prochaine arrivée des touristes. De même, beaucoup  des maisons typiques tombées en ruines sont en cours de restauration. Pour notre part, c’est dans la garrigue que nous nous aventurons, à la recherche des cinq sources qui abreuvent le village. Nous sillonnons entre les pieds de jeunes oliviers cultivés en terrasse, les pistachiers, les vieux cyprès, les chênes, les plantes médicinales, la sauge et le thym et nous abritons derrière un énorme rocher pour pique-niquer : tranches de jambon de poulet grillées au-dessus d’un petit feu, bâtonnets de carottes et kiri sur du pain = le régal ! En revenant vers le village, nous enjambons la plus dodue des sources, dont les abords sont aménagés : sans doute pour les touristes de passage… Des jeunes s’y sont retrouvés, autour du traditionnel thé, et nous papotons un moment avec eux.


    Shoba
k
    Nous arrivons à l’heure de la fermeture au portail de cette imposante forteresse construite par Beaudouin Ier, le premier roi de Jérusalem, au XIIème siècle. Le gardien  nous informe que nous ne pouvons pas bivouaquer au sommet du piton rocheux auquel est accroché le château, mais téléphone à l’un de ses amis, Saleh, qui tient un camp au village en contrebas et qui accepte que nous y passions la nuit. En fait, nous comprenons vite que Saleh est venu exprès pour nous ouvrir son camp, la
saison touristique n’ayant pas encore commencé… Il commence par nous offrir un thé puis nous montre les diverses installations de son « camp de Bédouin urbanisé » (sanitaires, tente-salon, terrasse…). Il doit rentrer chez lui, mais nous laisse accès à l’eau, à sa grande tente (pour que les enfants puissent jouer !) et au chouette jardin : nous sommes gâtés !
  
Le lendemain, nous partons à l’assaut de la forteresse que nous apercevons dans la colline. Nous reconnaissons entre autres une église, des canalisations, des douches (!), et des salles d’habitation, mais le plus extraordinaire, c’est la descente, à la lampe de poche, dans un couloir muni de 365 marches et qui mène à un puits, où les croisés allaient chercher de l’eau pendant les nuits de siège ! Nos valeureux moussaillons remontent courageusement tout cet escalier un peu affaissé et nous ne sommes pas mécontents de revoir la lumière du soleil ! Autour, le panorama est superbe : on contemple le Wadi Arraba, les montagnes des environs et les villages troglodytes abandonnés au pied de la citadelle.
 

21 Jordanie (suite)